RANDOM ACTS OF VIOLENCE - GOD BLESS AMERICA

LE FILM EST EN COMPETITION NOUVEAU GENRE POUR L'ETRANGE FESTIVAL 2020.


Loin de son pote de toujours Seth Rogen, Jay Baruchel essaie tant bien que mal de se frayer un chemin en tant que réalisateur. Son dernier film Random Acts of Violence, slasher méta produit par SND, montre à nouveau les grandes failles qui existent encore dans ses choix de mise en scène. Si les cinq premières minutes entretiennent l’illusion d’une grammaire intermédiale bien digérée, le reste du long-métrage sombre vers un sous-texte odieux sur le cycle naturel de la violence.



Et c’est bien dommage, car les références de Baruchel apparaissent très fortement dans le film. Bien aidée par la photographie de Karim Hussain, l’équipe technique réussit à donner un mouvement cinématographique à un médium loin d’être bêtement transposé à l’image. Le réveil du meurtrier dans son antre ou un plan large en grand angle flattent l’œil et semblent dessiner à première vue une mythologie pas dénuée d’intérêt sur le papier. Le problème est ailleurs : Jay Baruchel parait vouloir réfléchir sur le fondement d’un Art et le moyen de le mettre sur papier. Or, le fait que le tout gravite autour d’une histoire de meurtre évoque directement la sensibilité du sujet et du point de vue. Et c’est là que le réalisateur vacille. Le long-métrage bascule dans le problème moral de la violence, arguant sans aucune contestation dans la diégèse que la violence que présente le protagoniste, auteur de comics pour public averti, ne devrait pas exister. Ainsi, la sublimation freudienne est présentée in fine comme inacceptable. Cela aurait pu être intéressant, si le film s’intéressait à la cartographie de l’Amérique profonde qu’il dépeint en Iowa, loin des archétypes urbains personnifiés par le quatuor principal. Or, jamais ceci n’est contesté, tout est annoncé comme argent comptant et ne sert qu’à des pirouettes visuelles sans queue ni tête.

 

De fait, Random Acts of Violence devient un sommet de puritanisme où le gore devient un phénomène de foire, et où la mise en scène de Baruchel se métamorphose en un Karim Hussain Show, souhaitant coûte que coûte détacher chaque action du réel dès le départ pour semer la zizanie dans l’esthétique voulue. C’est dommage, car si la transition était effective directement dans les 80 minuscules minutes du projet, sans doute y aurait-il pu avoir un didactisme ludique et un spirale surréaliste assez vertigineuse. On peut aussi ajouter un casting à la ramasse, ne semblant ni croire au sujet ni même faire un effort dans leurs expressions. Vous l’aurez donc compris : voici un navet haute catégorie dont on espère sincèrement que Baruchel n’a pas compris les tenants et les aboutissants de son fil thématique.



RANDOM ACTS OF VIOLENCE - Un film écrit et réalisé par Jay Baruchel - Avec Jesse Williams, Jay Baruchel, Jordana Brewster - 80 minutes - 2020.

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