LES CONTES DES TERRES AU CURE - CHAPITRE I: REFERMER POUR REECRIRE.

[POUR VOUS FACILITER LA LECTURE, L'AUTEUR DE CE BILLET A VU SON FORT ACCENT LANDAIS ETRE SUPPRIME APRES RELECTURE DE LA PART DES MODERATEURS, ET CE SUR L’INTEGRALITE DU TEXTE. MERCI DE VOTRE COMPREHENSION.]

[ET BONNE ANNÉE.]

[ET POMMES SAUTÉES.]

[JE SUIS HILARANT MOI.]




"Il était une fois. Toutes les histoires commencent comme ça."
Abd Al Malik, Qu'Allah Bénisse la France, 2014. 



Il était une fois, dans le royaume de la cinéphilie, un individu bon vivant bien que financièrement modeste. Ses affaires n'avaient jamais vraiment évolué, lui qui refusa le travail après pourtant avoir été déclaré apte; mais cela provenait sans doute du fait qu'il n'avait pas réellement envie de prospérer tout de suite. Tan, l'individu dont je vous narre l'histoire depuis le début, vaquait dès lors à ses occupations chez ses parents qu'il a rejoint pour les fêtes de fin d'année, après s'être frayé un chemin entre les bourrasques présentes sur sa route et avoir survécu à un rude hiver, l'ayant même propulsé une fois de plus dans un univers fort fort lointain.

Lors d'une nouvelle journée pluvieuse, et ne sachant quoi faire, Tan décida de fouiller dans les affaires que ses géniteurs avaient soigneusement conservé dans de grands cartons. Au fond de l'un d'entre eux, caché entre ses bandes dessinées Les Blagues de Toto et ses jeux Pro Evolution Soccer pour PlayStation 2, se présentait un très grand et lourd miroir. Étrange, se dit notre personnage. D'où pourrait provenir cette glace ? Il la sortit dès lors de ses souvenirs d'enfance et la posa sur son bureau. Il se regarda, et se recoiffa dans le miroir, bien qu'il n'eût pas besoin de se retrouver face à lui pour se gratter la tête au moins 117 fois dans la même journée auparavant. Mais au fur et à mesure que Tan se contempla, il découvrit que la glace devenait plus opaque, s'assombrissait, afin de ne laisser paraître qu'une épaisse teinte noire, sans aucun reflet présent à l'intérieur. Tan commençait à se poser des questions, scruta derrière lui si le climat avait changé à l'extérieur, mais que nenni: il pleuvait toujours et la nuit ne tombait pas encore. La situation devenait de plus en plus inquiétante au moment où le miroir se mettait à émettre un certain souffle continu, comme une respiration. Tan fit deux pas en arrière, choqué de cette découverte. Il se blottit contre son lit, n'osant dépasser qu'un œil afin de suivre, entre fascination et effroi, l'évolution de cet objet pas comme les autres. Au bout de quelques minutes, il se releva, ne voyant aucun nouvel état apparaître, et se rapprocha avec méfiance de celui-ci. Dans un élan de stupeur et de confusion, il se mit à parler aux objets, souhaitant avoir plus de chance de communiquer avec cet étrange outil que Kristen Stewart avec ses robinets chez Olivier Assayas. 

"Miroir... ?"

Pas de réponse. Était-il fou à force de revoir Catwoman chez lui ? Rêvait-il ? Ou le miroir pouvait faire moultes choses mais ne pouvait parler ?

"Gentil le miroir... Hein... Gentil...

- Guy.

- AAAAAAAAAAAAH !

Tan sursauta et retourna derrière son lit. Son miroir venait de lui adresser la parole d'une voix intelligible, mais pas aussi effrayante qu'attendu par notre héros. Au contraire, elle paraissait même très... fainéante. Le miroir soupira.

"Qui a parlé ?, demanda Tan, la voix encore tremblotante.

- Là, fit le miroir. Eh ooooh, regarde, là.

Le miroir siffla pour appeler Tan. Il le fixa enfin, mais ne vit rien à l'intérieur

- Petit petit petit... Ehhh bah voilà, ça y est, t'as compris ! Salut. Et c'est Guy au fait, pas "Miroir", répondit le nouveau venu, avec une nonchalance et un certain mépris lors de l'énonciation du dernier mot de sa phrase. Tan ne le voyait pas, seul un épais brouillard noir restait. Le son parvenait des deux côté du miroir, de manière stéréoscopique [je vous l'avais déjà dit que j'ai fait un BTS montage ? C'est cool hein ? A bientôt., ndlr].

- Guy ?

- Oui, bah oui, Guy c'est mon nom, excuse-moi hein, on n'a pas tous la chance d'avoir des prénoms formidables sur cette Terre. Bon, qu'est-ce tu veux ?

- Mais d'où ça a un prénom un miroir ?

- D'où ça a un prénom un homme ? Tombe pas dans la catoptophobie, s'il te plait [mot compte triple dans tous les Scrabble de ta région, ndlr]. On devrait avoir les mêmes droits que vous. Bref on est pas là pour parler chiffons et produits lave-vitres, qu'est-ce que tu veux ?

- Ce que je v... Ah, comme dans les contes, je peux te poser des questions ?

- Oui, enfin on a bien aidé les contes quand même. Charles Perrault, tu connais ? Le mec a séquestré quatre miroirs pour trouver de l'inspiration. Fêlé ce type. Notre syndicat a bien gueulé mais bref longue histoire, j'ai la flemme.  Tu veux quoi alors ?"

Tan, amusé par cette histoire, prit une posture ridicule, à mi-chemin entre l'archétype du Prince Charmant et un tapir qu'on forcerait à vivre sur deux pattes. Le miroir, peu surpris par habitude, lâche un énorme soupir puis dit tout doucement "Oh putain, comme d'hab". Tan, l'air heureux, clame haut et fort:

"Miroir, miroir, mon b...
- Guy, l'interrompit l'objet.
- GUY. Dis-moi, Guy. Qui est le plus beau de toute cette planète ?
Ryan Gosling
- Pardon ?"

La réponse fut instantanée, comme si elle était préparée à l'avance. Tan faillit s'étouffer, au vu de la réactivité de son interlocuteur peu commun.

"Comment ça, Ryan Gosling ? Un peu facile comme réponse, tout le monde sait qu'il est classe.

- C'est vrai ouais, mais la convention de la réponse ne veut pas dire qu'elle est forcément erronnée. Ryan Gosling est assurément l'acteur qui a le plus réussi cette année, alternant le blockbuster grand public et des oeuvres plus intellectuelles. Et encore.

- Comment ça, "et encore" ?

- Et encore, le blockbuster grand public dont je souhaitais parler est lui-même une oeuvre hautement intellectuelle bien que parfois pompière dans ses symboliques, puisqu'il s'agit de Blade Runner 2049, réalisé par Denis Villeneuve. Cette suite, sortie 35 ans après son prédécesseur, considéré comme étant l'un des plus grands films tech-noir (comprendre: les codes du film noir inclus dans le genre science-fictionnel) que l'industrie cinématographique n'ait jamais connue, parvient à s'émanciper de son aîné à travers ce personnage de l'officier K, joué justement par Ryan Gosling. Cet officier est l'antithèse de Deckard, puisqu'il connait sa véritable nature, ne la remet jamais en question dans un monde où l'ambiguïté anthropomorphique est de mise. Sa confrontation avec le personnage du premier volet, bien plus âgé, prouve les différences notables sur leurs volontés d'accomplir leurs destinées avant l'arrivée de leur obsolescence programmée. En dehors de la caractérisation de son personnage central, Blade Runner 2049 parvient à s'émanciper autant que son protagoniste de son aîné réalisé par Ridley Scott, en y épurant les compositions de plans; en étirant à l'extrême la durée de ceux-ci afin d'y créer un charme hypnotique; en étendant l'univers au travers des métaphores tisées par le brillant chef opérateur Roger Deakins, où l’œil du premier volet ne devient qu'une partie du visage de son petit frère, et où ce même œil, vide, devient le symbole de l'entrée des nouvelles technologies dans l'industrie hollywoodienne (la scène où les organes offrant la vue aux individus offre un excellent questionnement sur la performance capture et jusqu'où le numérique peut remplacer la chair). Les thèmes sur la religion et sur le questionnement du plein pouvoir sont aussi assez bien abordées, notamment à travers le personnage de Jared Leto, marionnettiste du film qui étend son empire tentaculaire sur l'enquête menée par le personnage de Ryan Gosling. Il est cependant dommageable de voir Denis Villeneuve ne jamais réussir à négocier le virage en fin de métrage dans son film, entre l'indépendance de sa suite souhaitée de prime abord; et un raccrochement aux wagons de son prédécesseur, assez stupide et poussif, qui nuit à la compréhension globale de l'intrigue, puisque cette connexion ajoute de nouveaux arcs narratifs que le réalisateur québécois ne parvient pas à bien développer. Et que dire de cette scène d'action finale, sans doute montée par un confrère cognitif de Stevie Wonder ? Tant de belles idées novatrices vis-à-vis de celui de Scott gâchées par des trous scénaristiques et une volonté (ou une imposition ?) de se rattacher à celui de Scott.





- Eh bien... Tu m'impressionnes, Guy. Je dois te dire que je ne te savais pas aussi bon dans le développement de ton avis [La rédaction décline toute responsabilité en cas de "ouin ouin, regardez-le, le melon qu'il a pris le Tanguy". On est dans de la fiction. Merde., ndlr]. Mais un film ne suffit pas pour affirmer la supériorité d'un acteur ou d'un réalisateur sur le reste de ses comparses, tu en as bien conscience ?

- Ouais ouais, mais attends, j'ai pas encore parlé de La La Land.

- Mais il est pas sorti en 2016 La La Land ?

- Non non, il date bien de janvier dernier. Mais ne tergiversons pas autour des choix parfois hasardeux des distributeurs français: La La Land est un film à deux doigts du chef-d'oeuvre, pour plein de raisons. La première est sa capacité à m'avoir personnellement ému durant tout le film, mais ceci est purement affectif. La deuxième est la formidable capacité de son réalisateur, Damien Chazelle, d'avoir pu se servir du passé afin de pouvoir construire le présent. Jamais le film ne s'enferme dans de la complaisance nostalgie: il ne s'arrête jamais aux idées de ses bienheureux ancêtres, tels Un Américain à Paris (si vous avez vu le film, la référence est évidente) ou encore Chantons sous la Pluie; il se les réapproprie et les détourne, afin d'émettre une transition classique --> post-moderne (l'angle de caméra inscrit dans la modernité cadre un paysage onirique classique, fait à la main ou en train d'être conçu). Ces petits éléments marquants, entre recherche du post-modernisme et construction progressive des scènes démarquent alors La La Land des autres comédies musicales, annonçant alors un final dont le ton plus mélancolique qui dévie grandement de ses aïeux. Enfin, le dernier point qui marque dans ce film est l'exemplarité de ses deux acteurs principaux, Emma Stone et... Ryan Gosling toujours. Si la première citée crève l'écran par son immense palette de jeu, renforçant avec son seul personnage l'idée de la transition et de l'émancipation des codes classiques, Ryan Gosling, lui, EST l'archétype classique, puisqu'il ne trouve son confort que dans de la musique des années 1950/1960 (en témoigne l'opposition avec la scène où il se retrouve pianiste pour le personnage interprété par John Legend), a une attitude un peu nonchalante et charmeuse malgré ses problèmes financiers comme Gene Kelly dans [INSERER N'IMPORTE QUEL FILM AVEC GENE KELLY], et commente malicieusement les paroles de son acolyte lors de leurs shows musicaux, admirablement chorégraphiés par Mandy Moore. Tous ces arguments le rattachent alors très facilement aux figures de music-hall d'époque, et le rendant diamétralement opposé à celui de Emma Stone. Le seul défaut trouvable dans le film au final serait... Eh bien... Des plans sans mise au point à certains moments, sans raison valable. Mais c'est un petit caillou dans Paris-Plage ce que je dis là, il est très facile d'en faire abstraction en réalité.



- C'est vrai qu'il était vraiment passionnant ce film. D'autres suggestions ?

- Ouais, Song To Song. Mais je l'ai pas encore vu.

Un coup de briquet se fait entendre au fond du miroir. De la fumée blanche sort progressivement des recoins du miroir.

- Bordel mais qu'est-ce tu fais, dit Tan en toussant, après avoir tenté d'inhaler la fumée pour essayer de savoir ce que c'était. Mais... Tu fumes ?

- Bah ouais, rétorqua Guy, la voix cassée par sa cigarette. On a pas le droit de cloper quand on est pas activés, tu m'excuses hein. T'as qu'à te boucher le nez c'est bon. Ouais bon du coup Song to Song pas encore vu, mais par contre j'ai vu Voyage of Time, aussi de Terrence Malick. 

- Depuis quand un miroir ça fume ?

- T'en as pas marre de te poser toujours des questions à la con. J'te jure si j'avais des bras je t'aurais déjà frappé.

- Excuse-moi de pas avoir l'habitude parler à mes objets. Bref sinon; toujours dans ces délires mystiques le vieux fou ?

Le miroir sautilla, surprenant Tan dans son ironie mal placée.

- OUH QU'IL EST CON LUI ! Terrence Malick est un brillant réalisateur, mais qui a la fâcheuse tendance de se répéter dans ses expérimentations de montage depuis The Tree of Life. Il faut savoir que Malick use et abuse des mêmes artifices depuis un peu plus de 7 ans, entre ses différents axes narratifs en voix off, ses figures de style, entre contemplation d'un monde qui s'effondre et renaît et métaphores religieuses parfois malvenues. Sauf que Voyage of Time, sous couvert d'expérimentation au vu d'une voix off, par Cate Blanchett, semblant réciter des poèmes dans un montage alternant effets spéciaux et plans en DV, retrouve une vraie linéarité. Terrence Malick y voit ici le moyen de renouer avec une narration plus simple sur sa vision du temps qui passe et sur une cosmogonie étonnamment sexualisée, permettant de prouver que selon lui, l'univers n'est qu'éternel recommencement, et qu'il faut le chérir et le comprendre. Attention cependant: Voyage of Time ne reflète en rien une exactitude scientifique, il n'est que le reflet d'une poésie créée par son auteur.

- Je l'avais aussi vu au cinéma et pense pareil que toi. Cependant, je n'avais pas compris pourquoi son circuit salles dans notre pays s'est vue limitée à une séance unique. Au final, tout ce ci n'a mené à rien.

- C'est vrai, mais il faut savoir que cette idée de séance unique demandée par Mars Films, société distribuant le film, était à mon sens l'unique moyen de pouvoir accueillir de nombreux spectateurs pour un film que le public ne connait que pour l'exigence dont font preuve ses derniers métrages. Je me souviens avoir pu voir Knight of Cups en salles il y a quelques années déjà, et la moitié des spectateurs, déjà peu nombreux, avait quitté la projection avant même que l'on atteigne la première demie-heure. Malick souffre d'une image d'"intellectuel chiant" auprès du grand public, ne permettant pas à ses projets de s'assurer une rentabilité dans l'Hexagone.

- Donc cette idée de séance unique servait simplement à attirer plus simplement le public en lui faisant croire à un événement mondial ?

- Oui, clairement ! Surtout que, bien que le concept de la séance unique existe depuis longtemps, rares sont les grands réalisateurs qui voient leurs films être distribués de la sorte. Mais, malgré un certain nombre de places encore disponibles avant le début du film, force est de croire qu'il y avait nettement plus de gens qu'à l'accoutumée. et le côté événementiel de Voyage of Time s'est tari de lui-même avec la multiplication des séances spéciales, s'étendant dès lors sur trois ou quatre mois. En plus, la version proposée en salles française est une version atrophiée du montage original, destiné à des projections IMAX encore inédites sur le sol français, Brad Pitt devant également prêter sa voix au commentaire du film. On est donc encore très loin du vrai événement qu'aurait dû être ce film, la faute à notre retard technique, et une petite frilosité des distributeurs nationaux.



- Mais comment tu fais pour aller au cinéma vu que t'as pas de pieds ?

- Tu m'as vu sautiller et mon ancien maître m'amener partout, t'écoutes ce que je te dis au moins ?

- Désolé, c'était pour crédibiliser ton personnage pour le lecteur.

- Ton humour méta est nul Tan.

- Excuse-moi d'avoir au moins essayé.

- Tom Ford aussi.

- Ah merde. C'est vrai, répliqua Tan en hochant la tête et en levant les yeux au ciel. Nocturnal Animals ?

Nocturnal Animals.

- Le pire film que j'ai vu de ma vie.

- Tant que ça ?

- Oh oui. Toujours surprenant de voir un film aussi intelligemment vide se fourvoyer dans son cynisme didactique. Tom Ford démontre l'entièreté de sa prétention dans un film qui se sent obligé de pointer du doigt chacun de ses artifices pour montrer à quel point il est diablement intelligent. Sauf que tout son montage parallèle est digne d'un enfant de CM1 pas fichu de faire une bonne rime à l'édition, son esthétique clinquante s'enferme dans un système que Ford ne parvient plus à varier au bout de seulement un quart-d'heure, les acteurs sont extraordinairement mauvais et en font des tonnes, la faute au maniérisme forcé de la mise en scène de l'ancien photographe pour faire comprendre à nouveau qu'il est cynique; et la morale finale est d'un misérabilisme sincère bon à se jeter du haut d'un pont après avoir découvert pareille connerie.



- J'avoue que j'avais jamais autant en colère devant un film oui. Et quel jumpscare dégueulasse en plein milieu !

- Tu l'as dit.

- Pour autant, le cynisme dans le cinéma peut être un moyen de bien déconstruire le pas...

- Non.

- Comment ça, non ?

- Regarder une situation avec un œil moderne et cynique au cinéma ne sert qu'à ridiculiser autrui tout en mettant une barrière douteuse, prônant un certain rejet. Pourtant, il est possible d'être respectueux tout en faisant d'excellents films.

- Donc être cynique n'offre aucun respect ?

- Bah non, sauf si tout ceci est contredit, mais peu de films systématisant ceci n'arrive à créer une variation sincère au final. L'exemple parfait de ce cynisme se trouve dans le dernier rejeton de la comédie française, Daddy Cool, réalisé par Maxime Govare.

- Ah. Oui. Sacré Showeb...

- OUI, SACRE SHOWEB ! Il n'y a pas grand-chose à dire sur ce film puisqu'il présente le degré zéro de la mise en scène, agrémentée tout de même d'un plan-séquence compliqué à faire, certes, mais inutile pour ce qu'il raconte et spatialise; et son casting est à la ramasse car il subsiste une absence incroyable de direction d'acteurs. Rajoutons aussi dans ce cocktail le concept de "comédie-qui-a-vingt ans-de-retard", comme les trois-quarts de la comédie populaire française cette année (sérieux, a-t-on déjà vu une année aussi minable en terme de comédies populaires prônant un engagement raciste maquillé en liberté d'expression ?)  et inculque une morale à la personne finalement la plus méritante du film, celle qui a su trouver un juste milieu entre le côté sérieux et la folie, ce qui rend quand même la chose ultra-problématique. Mais le pire n'est pas là. Si tu as évoqué le Showeb, ce n'est sans doute pas par hasard.

- Les "connasses de blogueuses" ?
 

Guy soupira. Tan l'entendit écraser sa cigarette.

- Les "connasses de blogueuses". Au début du film, le personnage incarné par Laurence Arné, dessinatrice de renom, se fait interviewer par une blogueuse, au comportement paraissant normal: un peu excitée par l'interview, mais aux questions pleines de bon sens et sans un côté "fangirl" trop poussé. La caractérisation était excellente à première vue. Mais...
  
- Mais de suite après, Axelle Laffont, qui interprète son éditrice, est rejointe par Laurence Arné et lui dit ouvertement qu'elle en a marre que celle-ci se fasse interviewer par des, je cite, "connasses de blogueuses". La salle du Gaumont Champs-Elysées, composée à 95% de blogueurs, était hilare, et applaudissait même. Vous n'en avez jamais entendu parler de ça hein ? Eh bien c'est vrai. Mais revenons plus en détail sur cette séquence et ces mots. Tout d'abord, en extrapolant le contexte précédemment cité, ce passage est symptomatique de la fainéantise de plus en plus persistante de la comédie française, qui se "Sandlerifie", en prétextant qu'une insulte dite de manière nonchalante permet de faire rire. Or, ce n'est pas un ressort comique d'insulter quelqu'un, d'autant plus quand la blague, qui n'en est même pas une, est annoncée par un long plan sur Axelle Laffont, le regard un peu énervé et haineux qu'on lui connait, attendant sa dessinatrice. On sait à l'avance qu'elle va se moquer de la blogueuse, il n'y a même pas l'instantanéité de l'insulte qui peut prêter à sourire. Mais le pire n'est pas là.
  
- Le pire est que ce ressort aurait pu être un tacle gentillet ou une caractérisation basique du personnage de Laffont si cette réplique n'était pas répétée deux fois par deux personnes différentes, sans jamais être remise en question; si Andy Raconte, vlogueuse ou ex-vlogueuse, je sais pas trop, ne jouait pas dans le film; ou si le réalisateur lui-même n'était pas venu présenter son film devant la salle avant la projection ! Le comble est atteint. Et ça fait mal. Sinon à part ça le film est nul est c'est Michel Leeb qui balance la morale du film à la fin. Vu l'humour arriéré que se trimbale ce type, l'ironie est à son maximum...



- C'est quand même vraiment inquiétant que le cinéma français ne parvienne plus à retrouver ne serait-ce qu'un vingtième de sa splendeur. Seul Grave, thriller horrifique franco-belge, permet à l'Hexagone de ne pas couler, voire d'offrir des perspectives intéressantes à celui-ci.

- Non, quand même pas. Ne retenir que Grave serait oublier le triomphe accordé à des oeuvres telles que 120 Battements par minute de Robin Campillo, qui voit poindre à l'horizon des César qu'il mériterait amplement; ou encore Au-revoir là-haut, nouvelle création farfelue de Albert Dupontel. De plus, il serait injuste d'oublier le nouveau pastiche de Michel Hazanavicius, Le Redoutable, qui lui permet de retourner les codes de Godard contre ce dernier afin de le singer et d'en faire un personnage seul et ridicule, qui n'a pas compris comment il pouvait changer le cinéma, même s'il en a eu la possibilité plusieurs fois.  Il ne faut également pas oublier quelques grands noms, comme Luc Besson, qui a tenté d'offrir un film à l'ambition démesurée, plastiquement quasi-irréprochable malgré un entremêlement d'enjeux inutiles et mal exploités et les deux acteurs principaux soit à côté de la plaque, soit très mal digérés. En dépit du projet titanesque, le rendu final est quand même sacrément bâtard, n'offrant au final qu'un divertissement inoffensif et insignifiant. Après...

Guy réfléchit quelques minutes en marmonnant. Tan l'appela.

- Oui... ?

- Après, certains techniciens restent tout de même bien intégrés et performants à l'intérieur de l'industrie internationale. On va pas se mentir: le cinéma français ne s'arrête pas forcément à notre territoire. Là, de suite, je pense notamment à des personnes comme Alexandre Desplat à la musique ou...

- Pitof ?

Darius Khondji. Pitof ?

- Désolé, une absence...

- Ouais... C'est ça. Bref, Darius Khondji à la photographie a eu l'occasion de vivre une riche année, avec notamment deux grandes attentes parues, The Lost City of Z de James Gray, et Okja, de Bong Joon-Ho. Ce dernier a même été présenté à Cannes. Pas de Michael Haneke ou Woody Allen pour lui cette année, mais deux célèbres cinéastes tout de même. Autant dire que sur le papier, ça annonce quelque chose de bon.

- Ouais en effet. Et quel film, The Lost City of Z...

- Carrément. Ce film marque les retrouvailles de deux grand artistes de leurs temps après l'assez moyen The Immigrant, parvenant à établir des gimmicks communs qui servent le propos principal du film: l'obsession. Cette obsession est visible par le choix des filtres jaunis, qui avec leurs textures alourdissent l'image et donnent un sentiment d'oppression. Cette colorimétrie pesante diminue à chaque retour de Percy Fawcett, interprété magistralement par Charlie Hunnam, dans la jungle. Ce n'est pas la finesse incarnée, je l'avoue, mais de riches idées sont notables tout au long du film, même si elles auraient besoin d'être recontextualisées pour avoir du sens. Je pense par exemple à ce plan final polysémique, entre désespoir, obsession et hantise chez le personnage de Sienna Miller, comme si le paradis de Fawcett s'était refermé subitement sur tout sa famille. Cependant, si ceci parait peu subtil, Okja, quant à lui, est encore pire, tout en marquant une certaine crise identitaire dans la filmographie du chef opérateur franco-iranien.



- C'est clair que je me suis vraiment demandé pendant le film si c'était bien Khondji qui était aux manettes du système visuel. Je me demande si je l'ai déjà vu être aussi lourd et didactique dans ses choix de cadre, même si j'avoue qu'il n'a pas dû être aidé par l'indigence de l'écriture. De plus, certaines scènes, qu'il filme en plan-séquence, ne ressemblent absolument pas à un travail digne de son talent. Khondji semble parfois se prendre pour Emmanuel Lubezki, en tentant de suivre et de montrer des personnages reliés en petits espaces se rejoindre et se télescoper pour ensuite se perdre dans la foule, le tout à partir d'un éclairage quasiment naturaliste. Il y a un vrai souci dans ce film qui est que les probables demandes du cinéaste coréen, en plus d'être assez mauvaises au vu de leur lourdeur, ne correspondent en aucun cas à ce que peut faire ou qu'a pu faire l'ex-directeur de la photographie de Seven, rendant alors un travail fade et paraissant très impersonnel. Ce qui est vraiment dommage, puisque leur rencontre aurait pu offrir un grand dynamitage de l'industrie, mais sur Netflix.



- Netflix ? T'as même pas vu le film en salles ?

- Non, et alors ?

- T'es sûr qu'on peut dire que c'est du cinéma quand ça ne sort pas en salles ? C'est juste un téléfilm quoi.

- Bah... Pas vraiment. Enfin, oui et non. Netflix est un hébergeur légal, qui ne garantit ni ne conseille aucun support de diffusion précis. Rien ne t'interdit de regarder leurs créations originales sur un projecteur cinématographique que tu t'es soigneusement acheté auparavant. Un téléfilm, malgré une dénomination plus ancienne, est destiné pour passer à la télévision uniquement, et se démarque du film en salles rien que par son appellation. Il sort uniquement en télévision, point. Certes, les contre-exemples sont nombreux, de Duel de Spielberg au Ma vie avec Liberace de Soderbergh, mais leurs destinations ne sont pas à l'origine pensées pour du cinéma. Avec Netflix, c'est différent: leurs créations originales sous forme de long-métrage portent l'appellation "Film". Jamais le médium télévisuel n'est mis en avant. Par cette astuce, ils gagnent une certaine légitimité auprès d'un certain public.

- Mais si j'ai pas de projecteur ou rétroprojecteur, comment je fais hein ? Un film, ça doit être projeté en salles pour qu'on puisse l'appeler "film". Puis ils vont ruiner l'industrie, avec des prix aussi minimes au vu du catalogue qu'ils proposent.

- Le cinéma en France n'a en aucun cas besoin de Netflix pour voir sa fréquentation rester quasiment constante. En 2017, la fréquentation salles en France était de 209,22 millions de spectateurs, soit 1,8% de moins que l'an dernier mais plus que 2014 (208,97 millions) et 2015 (206,06 millions). Et quand on voit la qualité générale de l'année, ça fait un peu peur, d'autant plus que le prix des places hors moins de 14 ans a encore augmenté, malgré le retard technique de plus en plus ahurissant que l'industrie française continue de prendre vis-à-vis de ses voisins anglophones par exemple. Et ici, je ne parle que de salles de cinéma, pas de films: seul un cinéma en France possède l'IMAX 3D Laser, et elle n'est même pas à Paris mais... à Montpellier ! Luc Besson est le premier réalisateur à avoir pu obtenir une dérogation du crédit d'impôts pour pouvoir tourner Valerian en France, et non en Hongrie, et ça date de 2015 ce que je te raconte ! Personne avant n'avait pu le faire car personne n'avait osé faire un film avec des budgets aussi conséquents ! La défiance des studios vis-à-vis des nouveaux projets, et notamment en France, la montée des prix pour accéder à une oeuvre audiovisuelle, ainsi que le retard technologique des nombreux multiplexes cinématographiques de notre pays font que la demande de Netflix se fait plus compétitive que ses vieux confrères, offrant même un nombre illimité de visionnages de séries ou de films en UHD présents sur le catalogue de la plateforme au même prix qu'environ quinze films au cinéma en une seule année.

- D'autant plus quelques réalisateurs de renommée plus ou moins importante ont décidé de pactiser avec le nouveau Diable de Cannes, comme Bong Joon-Ho, David Michôd et son War Machine emmené par Brad Pitt, David Ayer et Will Smith pour Bright, mais surtout Mindhunter, nouvelle série originale produite par Charlize Theron et surtout David Fincher, qui réalise par ailleurs quatre épisodes sur les dix que contient la première saison.

- Ouais, et c'est le produit audiovisuel le plus abouti que j'ai vu cette année.

- Bah pareil. Dommage pour tous les détracteurs, c'est sur Netflix. Mais Mindhunter, par son scénario axé sur les théories freudiennes et de Durkheim; et sa mise en scène, se positionne comme étant la grande synthèse du cinéma de David Fincher, puisque reprenant des codes d'écriture de chacun de ses films, en y mêlant une imagerie et une texture dignes de The Game ou Zodiac. Cependant, il serait facile de ne voir en Mindhunter qu'un simple auto-hommage, puisqu'elle opère en même temps une fascinante descente aux enfers d'un enquêteurs qui se perd dans les méandres psychologiques des criminels les plus fous. En effet, à force de s'enfermer dans la mécanique trop bien huilée de son travail, qui consiste à identifier les déviances des tueurs en série, l'agent Macron Ford se retrouve bloqué dans son rôle, ne sachant plus refouler son travail et donc jongler entre son couple et ses investigations. Force est de constater également l'immense pouvoir de Fincher sur la série, les autres réalisateurs se contenant de singer non sans réussite le style d'un des plus grands maîtres du cinéma post-moderne actuel. Christopher Probst et Eric Messerschmidt, chef opérateurs de la série, parviennent également à bien cerner les différents changements d'atmosphère souhaités par le showrunner Joe Penhall et son producteur exécutif cité plus haut; mais j'avoue qu'ils doivent être bien aidés par le retour de Kirk Baxter au montage, chef d'orchestre de la maestria de The Social Network par exemple, dont l'exécution rythmique diffère avec la série mais le choix esthétique des cadres pas tant que ça. Une grande série, non visible en salles. Dommage pour les détracteurs, encore une fois, mais Neflix semble offrir bien plus de libertés et de choix à de vrais auteurs que les studios cinématographiques...



- Et Stranger Things 2 aussi c'est tel..

- Non.

- Non ?

- Non. Pas vu. On a abrégé les souffrances cette année.

- Pourtant, même la première saison n'a rien de cynique envers le passé. C'est bien ce que tu aimes, non ?

- Alors oui, mais non. Il y a cynisme, et il y a "doudou". Une oeuvre "doudou", c'est l'équivalent des Memberberries dans South Park: elle ressasse le passé pour te rappeler à quel point c'était bien.

- C'est pas parce qu'une série se passe dans les années 1980 que forcément elle te rappelle à quel point avant c'était bien.

- Oui, c'est exact. Mais Stranger Things me donne la fâcheuse impression qu'il s'agit d'une série se basant sur des jeux de pistes, n'avançant que par "easter-eggs". Le but de la série n'est alors plus de s'attacher des personnages à mon sens, mais tenter de découvrir ce que la narration peut proposer vis-à-vis des références incluses dedans. La série ne propose même pas de réflexion sur son idée de revisiter le passé, elle ne fait que le recycler bêtement pour en ressortir des pistes narratives et thématiques préconçues peu intéressantes. Du moins, ça ne m'intéresse pas, je préfère qu'on me surprenne plutôt qu'on me rappelle, mais c'est ad hominem. Mais pourquoi je m'entête à dire ça. J'ai pas vu la saison 2 et recycle ce que tous les détracteurs ont pu dire sur la première.

- Du coup, t'as pas dû aimer Ça, le nouveau film d'horreur de Warner ?

- Si, mais je t'avoue que j'ai eu peur au début, de par son traitement programmatique de la peur en début de métrage (un bête enchaînement d'actions censées terroriser des gamins dont on ne sait pas grand chose encore, et dont leurs peurs ne sont même pas encore entièrement caractérisées à ce moment du film); et ça démarrait un peu à la Stranger Things, en surlignant l'époque à laquelle se passait ce film. Pourtant, un simple synthé aurait suffi, mais non: rajouter de la musique et un plan large sur des maisons très typées 80s en supplément devaient sans doute être obligatoires pour les studios. Par chance, le film accélère après ce passage, en offrant de sacrés moments de trouille et en offrant des variations intéressantes à Pennywise, clown devenu de plus en plus borderline et vicieux, au contraire d'un Tim Curry dans le remake, bien plus joueur. C'est un autre versant du mal, imaginé par Stephen King à l'origine, qui est présenté ici, et ce n'est pas plus mal au final. J'aime à penser que ce clown est un Looney Tunes dépressif, qui se sert du sadisme, de la métatextualité et de la comédie de l'absurde pour extraire la peur des enfants qu'il souhaite manger pour survivre. Or, comme un Toon, c'est la vision impassible d'autrui qui l'amène principalement vers la défaite: moins on rentre dans son jeu, plus il semble s'affaiblir/

- De plus, le film ici parvient plus à présenter les différents problèmes des enfants, et qui plus est frontalement. Le film est très difficile car il traite des violences faites aux enfants, de la manipulation, de la pédophilie, de la découverte de la puberté, de l'affirmation de soi, etc, tout en ayant un oeil paternaliste sur ce qu'il arrive. Bon, il est vrai que le sound-design nuit parfois à la crudité de certaines scènes, celui-ci étant parfois trop présent par rapport à ce qu'il devrait être, mais c'est vraiment bien de voir de jeunes cinéastes qui ont de l'énergie et du talent à revendre pour revisiter de grands classiques de la terreur. Et malgré le sujet épineux, Andy Muschietti arrive à aussi bien s'en sortir que Fede Alvarez pour son remake de Evil Dead, même si l'hypertexte reste douteuse, les deux films n'ayant pas grand chose en commun dans leurs tons et ambiances.



- Clairement. L'horreur cette année s'est plutôt bien porté, qu'on se le dise. Certes, certains films n'ont rien offert de bien passionnant à se mettre sous l’œil, comme chaque année, mais Blumhouse a su, par exemple, offrir deux bombes que sont Get Out par Jordan Peele et surtout Split, le retour fracassant de M.Night Shyamalan dans les sommets du box-office mondial, à trois mois d'intervalle. Du côté des Majors, en plus de Ça chez Warner, Darren Aronofsky chez Paramount a bien dérouté en septembre dernier avec son culotté et très symbolique Mother!, qui a autant fait d'admirateurs que de détracteurs. Mais les excellents films ne puisent pas leurs racines à partir de cette division, d'ordinaire ?

- C'est encore trop tôt pour dire ce qui va marquer l'inconscient collectif et ce qui va tomber dans l'oubli. Surtout que certains anciens films de Darren Aronofsky sont d'ordinaire reconnus pour des artifices musicaux ou visuels qui n'apparaissent pas dans Mother!. Il est donc compliqué de prédire son avenir immédiatement. Par contre, tu as oublié d'évoquer le retour de la grande saga lucrative Saw, avec un huitième volet étrangement différent mais pas inintéressant des frères Spierig. Jigsaw n'est pas Saw VIII: il interagit plutôt bien avec le passé d'un point de vue thématique, faisant oublier l'immensité de ses incohérences vis-à-vis de ses aînés. En effet, Jigsaw s'oriente vers la dérive extrême du jeu, c'est-à-dire le plaisir de faire et le plaisir de voir, choses qui étaient ressenti par ailleurs par les spectateurs eux-mêmes devant les derniers volets, ceux-ci jouant plus le côté sanglant que la vraie envie de raconter une histoire. De ce fait, Jigsaw se sert du passé plus extra-diégétique que diégétique (le ressenti spectatoriel et l'absence progressive de morale) pour mieux s'ancrer dans l'octalogie. Mais le passé, si tu as bien suivi notre discussion, a bien été le fil rouge de notre discussion, puisque plus que jamais, le regard dans le rétroviseur est devenu un rouage essentiel de notre société. Comme précédemment, la question qui a taraudé était: comment l'appréhender ? Jigsaw a fait ce choix, le dégradant sans pour autant lui manquer de respect, afin d'établir un nouveau pan discursif de l'univers tentaculaire de la saga initiée par James Wan et Leigh Whannell.



Star Wars a aussi fait ce choix pour la suite de son avenir cette année d'ailleurs.

- Oui, mais il n'avait pas le choix, à mon sens, de parler du passé de cette manière. Bah ouais: à un moment, il faut avancer, et faire table rase de ce qui a pu être fait par ses prédécesseurs. Et pour moi, Rian Johnson l'a réussi. Les Derniers Jedi orientent le récit à travers l'idée de la désobéissance: chaque personnage parvient à avancer en décidant de sortir des rails et en tentant de trouver une solution eux-mêmes. Eh bien le réalisateur fait pareil, orientant les références de la saga vers les films de sabre japonais, comme Gareth Edwards avait pu le faire de manière épisodique dans son gloubi-boulga indigeste Rogue One; en se délaissant de nombreux personnages qui auraient pu faire défaut, comme avaient pu le faire Fincher et les scénaristes pour Alien 3. Il parvient aussi à se débarrasser des artifices devenus extrêmement ringards des premiers volets, ne plaçant qu'une seule transition en volet sur les 2h32 de pellicule 65mm qui servent de film; et se sépare même des plans-b=vignettes, influencés par le travail de William Cameron Menzies, dont George Lucas était friand ! Et en même temps, il est agréable de voir un réalisateur désamorcer des théories faisandées, n'ayant fait surface qu'à partir des spectres passéistes qu'annonçait JJ Abrams dans Le Réveil de la Force: il fait son film, déconstruit un univers avec une sincérité et un humour (qui fonctionne pas toujours, c'est vrai) qui le caractérise, LUI, et pas Disney. Je suis persuadé que les studios lui ont laissé une carte blanche sur le scénario et la réalisation, d'où les incroyables destructions de mythe et les idées novatrices du projet, dénuées de cynisme - non, l'introduction n'est pas si cynique, elle ne fait que présenter la personnalité téméraire et très "tête brûlée" de Poe Dameron. C'est une franche réussite, qu'il faudra sans doute digérer un certain temps avant de la reconnaître comme telle.



- C'est vrai, ouais. T'as raison. Mais du coup, tu crois sincèrement que Abrams va réussir à pondre un opus sans aucune nostalgie alors qu'il s'agit du socle de l'intégralité de ses longs-métrages pour Star Wars IX ?

- Je sais pas, le temps le...

- Attends.

- Quoi ?

- Qui parle ?

- Bah c'est moi, Guy.

- Non, Guy, c'est moi.

- Hein ? Mais t'es Tan non ?

- Bah non ?

- Salut les gars !

- T'es qui toi ?

- Bah, Ngu.

- Qui veut du café ?

- C'est quoi ce bordel ?

- Mouais... Bof...

Terminant la dernière cigarette de son paquet, Tanguy décida de refermer l'ordinateur portable devant lui, trouvant que son histoire ne tenait pas vraiment debout. Il savait pertinemment qu'il y avait simplement à faire une liste pour annoncer un top et un flop 10, mais son entêtement l'a forcé à écrire un pavé lui paraissant intéressant mais complètement déstructuré. Promis, se dit-il en quittant la pièce. Cette année, j'apprendrai à écrire.


Bonne année 2018.









Commentaires

  1. Faîtes pas attention à moi, je fais que coucou, voilà, salut...Au revoir quoi.

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    1. Eh bien mon jeune ami, avec le premier degré qui me caractérise si bien, je te salue en retour. Bises, Milla.

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